Alors qu’une majorité d’experts se montrent raisonnablement pessimistes quant à la possibilité d’atténuer le réchauffement climatique, Loïs Moulas se veut optimiste et s’emploie à transformer un secteur immobilier "immobile" par nature, quitte à brusquer par un franc-parler teinté d’une quiétude rassurante.

Responsable de 43 % des consommations énergétiques et d’un quart des émissions de gaz à effet de serre en France, le secteur immobilier doit prendre sa part dans la transition énergétique. C’est la mission que s’est donnée Loïs Moulas : encourager la prise de conscience, impulser le changement, accélérer la transition, d’abord en tant que conseil avec plusieurs bureaux d’études puis en qualité de missionnaire avec l’Observatoire de l’immobilier durable.

Itinéraire

Loïs Moulas a grandi à Grenoble, au pied des montagnes, et dans le Sud-Ouest, jamais très loin des côtes basques. Ingénieur de formation – il est diplômé de CentraleSupélec – il n’en est pas moins entrepreneur. En 2008, diplôme en poche, il co-fonde Sinteo, bureau d’études techniques de la qualité environnementale, avec deux copains d’école. La société passe de 3 à 40 collaborateurs en cinq ans, des économies d’énergie à la trajectoire carbone, au cours d’un cycle où l’industrie immobilière était plus préoccupée par son avenir que par celui de la planète. Sinteo rejoint le groupe Onet en 2013. Dans l’intervalle, Loïs Moulas partage son temps entre le bureau d’études Terao avec lequel il intervient en Asie et en Amérique latine en contrepartie de ses bonnes recettes acquises chez Sinteo et la création de l’Observatoire de l’Immobilier Durable (OID), association à but non lucratif dont l’objet consiste en l’accélération de la transition écologique de l’industrie immobilière autour de multiples programmes, parmi lesquels la résilience des territoires, la décarbonation des bâtiments et la finance responsable. En pratique, l’observatoire produit des ressources, vulgarise, veille, mesure et accompagne. L’association, qui fait référence en France, regroupe aujourd’hui 120 acteurs, pour l’essentiel les leaders de l’industrie immobilière, de la gestion de patrimoine et de la construction. En 2015, Loïs cède son titre de président pour prendre la direction générale de l’OID avant de fonder, l’année suivante, Wild Trees, une société de conseil et d’ingénierie, spécialisée dans les enjeux énergétiques, climatiques et écologiques, au service des acteurs publics et privés.

Il entreprend de faire passer tout un écosystème, du cynisme à la bonne volonté, de la parole aux actes, des labels à l’action

Humain

Humble, presque évasif quand vient le temps de parler de lui, l’entrepreneur précise être à l’origine de la "création et de la gestion d’un certain nombre d’entreprises", sans donner plus de détails. Bien que l’on puisse s’y tromper, avec un curriculum vitæ résolument immobilier, ce domaine ne constitue pas le fil rouge de sa carrière. C’est bien la nature qui l’étreint et sa défense qui l’anime. Il considère l’OID comme de "l’entrepreneuriat écologique et sociétal" en résonance avec la notion d’entreprise sociale et solidaire. Avec cette association, Loïs Moulas entreprend de faire passer tout un écosystème, du cynisme à la bonne volonté, de la parole aux actes, des labels à l’action. Il estime qu’il y a aujourd’hui une "confusion entre efficacité et sobriété" qu’il s’échine à réduire par son apostolat. Son auteur préféré n’est autre qu’Isaac Asimov, à l’origine de l’œuvre de science-fiction Le Cycle de Fondation considérée par l’écrivain américain comme "un roman historique du futur" et qui présente une dystopie plus vraie que nature. Mais c’est une rencontre qui marque le directeur général de l’OID en la personne de Philippe Bihouix, un homme "entier avec ses convictions et exemplaire dans sa vie personnelle" et qui a réussi à démocratiser le concept de "low-tech", basses technologies, auquel Loïs Moulas contribue également à la vulgarisation au travers de l’association Low-Tech Building. Sur son temps libre, Loïs "griffonne des trucs de temps en temps". Comment conjugue-t-il ces différentes activités? "À partir du moment où on bosse sur des sujets qu’on aime, on trouve le temps…" L’immobilier? Toujours pas… "L’écologie et la nature" assurément.

Alban Castres