Sophie Lapisardi est avocate associée au sein du cabinet Lapisardi Avocats, présidente de Lexclair, organisme de formation au legal design et coauteur de 52 règles de legal design (Lexclair 2022).

DÉCIDEURS. Pourriez-vous présenter votre cabinet : l’historique, les domaines couverts, etc. ?

Le Cabinet Lapisardi Avocats est dédié au droit public des affaires avec une dominante en contrats publics (marchés publics, concessions, conventions d’occupation du domaine public…). Nous répondons à tous les besoins de nos clients grâce à une vision à 360 degrés

Quelles sont ses spécificités, comme la valeur ajoutée, les missions… ?

Notre valeur ajoutée est une pratique quotidienne du legal design et l’utilisation de techniques innovantes. Le legal design est un mode de pensée qui permet de concevoir des documents et présentations juridiques clairs, accessibles, engageants et impactants. Tous les domaines du droit sont concernés et tous les actes : mail, consultation, note d’information, article, écritures contentieuses, présentation, formation, vidéos… Naturellement, ces techniques permettent de communiquer sans perdre en rigueur et en sécurité juridique. Le legal design permet également de concevoir des services et des outils innovants pour les clients internes ou externes et les usagers. Ce mode de pensée s’appuie sur plusieurs techniques innovantes : un langage juridique clair et une visualisation de l’information juridique. Dès que possible, en complément d’un rendu littéraire concis, nous utilisons des moyens visuels (schémas, tableaux, cartes mentales…) pour synthétiser tout ou partie de notre raisonnement juridique. Pour finir intervient la méthode du design thinking pour innover dans notre pratique du droit en étant centré sur notre utilisateur : notre client, le magistrat et tous les utilisateurs de nos documents/présentations.

Pouvez-vous donner des exemples de cette pratique et des bénéfices pour vos clients ?

Un gain de temps. Notre temps et celui de nos interlocuteurs sont précieux. Sélectionner les informations pour donner l’information pertinente à notre client est indispensable. Par exemple, nous proposons toujours deux niveaux de lecture pour une consultation : une consultation pour la direction juridique (DJ) et une note de synthèse sur une page à destination de la direction et/ou des opérationnels rédigés selon leur logique et avec les techniques de langage juridique clair. Résultat : la DJ dispose d’une base juridique solide tout en gagnant du temps pour sa communication interne. Et elle en fait gagner à son client interne.

Une meilleure collaboration et une optimisation des process.

Le legal design permet de concevoir des outils et des solutions juridiques innovants. On pense bien sûr à des fiches pratiques claires que les opérationnels auront envie de lire ; des formations dont ils mémoriseront facilement les messages clés ; des présentations impactantes pour la direction… Mais il y a plus : les chatbots sont aujourd’hui un moyen efficace de décharger les DJ, à condition d’avoir bien compris les besoins des utilisateurs, d’avoir posé les bonnes questions et d’y avoir répondu de manière claire et efficace. De plus, nous intervenons pour fluidifier et optimiser la fonction achats chez nos clients publics.

"Ces techniques permettent de communiquer sans perdre en rigueur et en sécurité juridique"

La phase de préparation et de passation des contrats fait intervenir plusieurs parties prenantes dont les prescripteurs et les acheteurs. Les relations sont souvent tendues entre ces deux acteurs qui doivent pourtant collaborer étroitement. En s’appuyant sur la pensée design et un travail en empathie, nous avons développé un nouveau service pour coconstruire avec nos clients une meilleure collaboration, des outils et un process optimisé.

Plus de sécurité, de confiance et de transparence.

Des contrats clairs sont le gage d’une meilleure compréhension par les opérationnels, d’une meilleure exécution par les parties avec, corrélativement, une baisse du nombre de litiges. De ce fait, la marque entreprise n’est pas en reste car des contrats clairs véhiculent de la confiance et de la transparence. Le legal design est également indispensable pour la compliance et nous l’appliquons pour la réalisation de cartographies des risques et de codes de conduite anticorruption.

Un atout dans le cadre de contentieux et règlements amiables.

Par exemple, nous avons constaté que nombre de maîtres d’ouvrage rejetaient des réclamations, faute d’une vision claire des enjeux. Or, construire sa réclamation en partant d’une réflexion liée aux différents utilisateurs (maître d’ouvrage/maître d’œuvre - décisionnaires non-juristes/ juristes) change radicalement la manière de la structurer et augmente les chances d’atteindre les objectifs de l’entreprise. Quant aux magistrats, ils ne veulent plus lire d’interminables écritures. Ils demandent de la concision et des éléments visuels pour appréhender plus rapidement les aspects factuels et techniques.

"Ce mode de pensée innovant ouvre des possibilités infinies de collaboration"

Les techniques de legal design permettent de gagner en persuasion en les guidant dans les écritures. Nous produisons même, dans certains contentieux, des vidéos, notamment en motion design, à l’appui de nos écritures. Ce mode de pensée innovant ouvre des possibilités infinies de collaboration pour la plus grande satisfaction de tous les acteurs et de nos clients.

Est-ce que le legal design est une réponse à l’avènement des intelligences artificielles (IA) ?

L’IA et le legal design représentent deux aspects complémentaires de l’évolution du secteur juridique. Le legal design peut effectivement servir de réponse à certains défis posés par l’avènement des IA, en humanisant la technologie et en rendant l’information juridique plus accessible et compréhensible. Nous utilisons également l’IA pour accélérer notre pratique du legal design, pour toutes les étapes de la méthode Lexclair de legal design.

Dans ce cas, le legal design constitue-til un enjeu particulièrement important pour les conseils juridiques ?

Il permet à tous les professionnels du droit de réinventer leur manière de communiquer et le service apporté à leurs clients internes/ externes et aux usagers. Il leur permet également de développer leurs soft skills, notamment l’empathie et l’adaptabilité. Ces deux soft skills sont indispensables pour relever les défis qui attendent tous les professionnels du droit.

La rédaction