Les présentations en grande pompe de la firme à la pomme ne suffisant plus tout à fait à nous faire acheter tous les ans le même téléphone 20% plus cher, le jus de cerveau a coulé à flots du côté de Cupertino pour repousser les frontières du superflu. Et c’est assez réussi.

« One more thing… », a simplement eu à teaser Tim Cook, le patron d’Apple, devant une foule en délire, avant de lever les mains au ciel tel le grand prédicateur d’un royaume à venir. Une terre promise où l’on pourra s’évader un peu plus des contraintes d’une réalité qui, concédons-le, n’est pas en définition 4k, ne peut pas se mettre sur pause ni se plier au moindre mouvement de notre œil ou de notre doigt, et qui a le désavantage d’être peuplée d’affreux personnages qui n’ont pas exactement la même opinion que nous. « Vision Pro peut transformer n’importe quelle pièce en votre propre théâtre personnel », promet le site d’Apple. La réalité peut aller se rhabiller. Et il ne vous en coûtera que 3 500 dollars.

Virtuel éden

On pourrait certes succomber à l’enthousiasme béat d’un monde de la tech qui voit dans cette innovation une nouvelle rupture, « l’ordinateur de demain », la promesse de nouvelles opportunités business. Sans se soucier du triste symbole que constitue le fait de se mettre un casque sur les yeux pour repousser une réalité qui n’a jamais demandé autant notre plus grande attention. On pourrait également s’extasier devant cette nouvelle preuve du génie humain. Sans se désoler qu’il ne s’applique trop souvent qu’aux choses les plus inessentielles de notre existence. Oui, on pourrait juste poser notre postérieur dans un canapé confortable, louer le Dieu Tech, et succomber définitivement à une virtualité qui, après tout, nous occupe déjà largement. 

La réalité c’est crevant. C’est bruyant, ça sent souvent mauvais, ça nous demande de faire et ne pas faire plein de trucs, et c’est bourré d’apocalypses potentielles, toutes plus effrayantes les unes que les autres. Adieu donc, monde réel. Tu peux garder ton climat foutraque, tes pauvres qui crèvent de faim et tes riches en jet, tes couchers de soleil basse def et tes amours décevantes. À nous le virtuel éden !

Antoine Morlighem

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